Note : les vidéos n'étant pas lisibles sur tous les modèles de tablette, voici l'adresse de celle-ci, en attendant que j'adapte la plateforme en fonction : https://www.youtube.com/watch?v=tJ4HPDr21aE
Hier, un enregistrement apparemment authentique permettait au monde connecté d'avoir un rapide aperçu de l'arrestation musclée dont faisait l'objet le député Belge Laurent Louis, dans la ville de Mons, pour "récolte de signature sans autorisation communale".
Pour ceux qui ne connaissent pas le fondateur du mouvement "Debout les Belges", sachez simplement que c'est un homme politique qui a notamment mis les pieds dans le plat le plus indigeste de l'histoire récente de la Belgique, à savoir les dessous de l'affaire Dutroux. Laurent Louis est aussi un féroce opposant d'Elio Di Rupo, l'actuel Premier ministre belge, qui endosse également la casquette de bourgmestre de Mons, ce qui permet d'avoir certains indices permettant d'expliquer l'excès de zèle des forces de l'ordre locales à l'encontre du député.
Cela étant dit, il ne vous aura pas échappé que ce n'est pas la vidéo de cette arrestation qui nous intéresse aujourd'hui, a en juger par l'extrait placé en tête d'article. Je m'explique.
La séquence qui ouvre la rubrique du jour est extraite du film "I comme Icare", réalisé en 1979 par Henri Verneuil et mettant en scène Yves Montand sur une bande originale d'Ennio Morricone. Ce passage reconstitue l'expérience de Stanley Milgram (aussi appelée expérience de Milgram) sur la soumission à l'autorité. En bref, il s'agit d'observer la propension d'un individu à obéir à un ordre contestable imposé par sa hiérarchie, ou, en d'autres termes, de mesurer son degré de soumission à celle-ci.
Le lien entre l'arrestation de Laurent Louis et cette expérience de psychologie sociale est multiple, l'actualité malheureuse du politicien belge nous permettant de constater que :
+ La soumission des policiers à un ordre dont la légitimité est discutable et qu'ils doivent exécuter en plein jour devant témoin rend ces derniers agressifs au point d'en oublier les fondamentaux du métier. Le sujet de l'expérience, soumis à un dilemme similaire, réagit de la même manière.
+ La soumission de la population à l'ordre représenté par les policiers empêche une foule en surnombre d'agir d'une manière ou d'une autre (séparer les policiers du politicien, faire bloc, etc...). Dans le film, le sujet est libre de désobéir, mais ne le fait pas.
+ La soumission des internautes à la conception politicienne de l'organisation de l'État fait que ces derniers sont en grande partie choqués par ce mauvais traitement parce que c'est un politicien qui en est victime, comme le sous-tendent de nombreuses réactions publiées sur la toile. Là, c'est la réaction d'Yves Montand qui peut être assimilée à cette forme d'indignation sélective conditionnée.
En conclusion, ce sont ces petits détails de ces comportements humains qui alertent sur la quantité de travail qu'il y aurait a faire pour sortir des cadres que les sociétés ont construit, à bon ou à mauvais escient. Je me permets donc de vous orienter vers cet axe de réflexion, en vous encourageant, comme d'habitude, à vous exprimer sur le sujet dans le fil des commentaires.
Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. Notez que le film de Verneuil est relativement accessible sur le net et qu'il vaut largement le détour.
Bon dimanche et à demain pour le résumé de l'actualité de la semaine!
Fyldar Jones
Sexssayiste faiseur de pluie
PS : Les horaires de publications des artciles sont désormais décalés de deux heures, pour des raisons d'organisation. Le nouveau créneau s'étendra donc de 14/16 h au lieu de midi/14h (GMT + 1). Merci pour votre compréhension.
Mmm... Difficile pour moi de faire un parallèle entre l'arrestation du député belge et l'expérience scientifique de Milgram ou le film de Verneuil.
ReplyDeleteDans la scène filmée de l'arrestation (réelle), on voit des policiers armés qui n'hésitent pas à menacer (matraques) et à agir (prise de judo, mouvements brusques et menaçants...)
Difficile d'agir en tant que témoin contre cette autorité démultipliée (équipe de policiers) sans accepter le risque de se prendre un coup de matraque et de finir éventuellement défiguré, à l'hôpital, ou au cimetière. Sans parler de la certitude de se faire arrêter aussi et de passer en jugement. Huhuhu... Coût élevé pour une désobéissance pas forcément efficace et prévisiblement peu rentable.
Par ailleurs, pour que les témoins agissent ensemble (de concert) contre cette autorité il eût fallu que l'acte de résistance soit programmé et préparé. La surprise, ici, suscite un mélange de sidération et de fascination : 2 ingrédients essentiels du fascisme.
Dans le film (une fiction), les 2 personnages testés (le type aux manettes et Montand) sont isolés : ils ne peuvent pas agir ensemble car ils ne sont pas mis en relation.
S'opposer individuellement est trop coûteux pour le type aux manettes : il s'est engagé dans l'expérience, donc il en a programmé le développement et il s'est porté en quelque sorte garant de sa réussite en acceptant son principe dès le départ (qui plus est, avec le consentement du personnage programmé pour être puni.)
Quant à Montand, il est (faussement) mis dans la confidence : il est manipulé dans l'objectif de le faire passer pour un témoin extérieur et supérieur (car le scientifique fait semblant de lui expliquer les tenants et les aboutissants...) Difficile de s'opposer à une autorité qui vous fait passer pour supérieur.
Les circonstances étant trop différentes, je ne pense pas qu'on puisse les mettre en parallèle. Mais les 2 documents peuvent tout à fait faire réfléchir à la nature et aux circonstances de l'obéissance et de la désobéissance.
Sujet du bac prévisible en cette mémorable année quenellienne ? (Par ailleurs anniversaire de la Grande guerre où des soldats se sont fait fusiller pour désobéissance.)
(Une pensée pour Rosa Parks en ce lendemain de la Journée des Femmes (mouaha) ... Pour Antigone aussi. (Une désobéissante mythique réelle, une désobéissante mythique de fiction !)
Et Eve aussi, tiens, la 1ère quenellière de tous les temps ? MOUAHA !
Bonjour!
DeleteAlors, il ne s'agit pas de vous seul, mais de vous et de la foule qui vous entoure, ce qui n'est pas exactement la même chose.A 3 contre 1, la matraque devient tout de suite moins problématique et à 10 contre 2, l'identification devient beaucvoup plus compliquée. Enfin, l'enjeu, c'est de libérer un petit bonhomme secoué par deux types en uniformes sans raison valable apparente.
Quand à la nécessité de préparer l'acte, elle n'est nécessaire à mon avis qu'à cause de cette forte soumission à l'autorité. Je pense qu'en fonction des zones, des milieux sociaux et des cultures, l'impact du factueur surprise est marginal. Votre raisonnement est donc spécialement rattaché à ce type de foute (urbain européen de l'ouest). En fait, c'est plus la concertation spontanée, la clé. Ceci dit, je retiens votre observation.
Dans le film, tout ce que vous expliquez est juste mais vous oubliez un détail : le type aux manettes est libre et n'est aucunement menacé de représailles physiques en cas de désobéissance (enfin, il me semble). On dirait presque qu'il considère le fait d'être terrorisé comme une partie de son travail (la déférence dûe au col blanc). Enfin, si l'analogie entre l'expérience, la foule et les internautes peut sembler difficile à identifier, celle qui la relie aux deux policiers est tout de même plus évidente à constater.
En tout cas, je vous remercie de vous être prêté au jeu en vous investissant autant et je vosu souhaite une excellente semaine.